Adélaïde – La belle du Sud

C’est sous la pluie que nous quittons Uluru et repartons vers l’Est jusqu’à la Stuart Highway, puis bifurquons plein sud. L’état des routes est très inégal et des flaques se forment sur la chaussée déformée par le passage de nombreux poids lourds : la route en 2 x 1 voie est limitée à 110km/h, beaucoup trop sous ces trombes d’eau et ce brouillard naissant ! Nous passons la frontière et entrons dans l’Etat de South Australia : l’Australie Méridionale. Les paysages sont encore plus pauvres ici : des plaines très plates, parfois couvertes de buissons bas très secs, et pas un arbre ou un élément de relief pour attirer le regard. La végétation basse fait place à un vrai désert : de la terre brune à perte de vue, et bientôt apparaissent çà et là des monticules de gravats, parfois un peu plus clairs que le sol. Nous approchons de Coober Pedy, la capitale mondiale des mines d’opales. Le paysage grêlé par les excavations minières et le temps maussade donnent un air sinistre à la ville et à ses environs.

 

Coober Pedy

Pas de chance, car il ne pleut que 20 jours par an ici ! Coober Pedy tire son nom de Kuba- Piti, qui en dialecte local signifie « terriers d’hommes blancs » : on imagine en effet la surprise des aborigènes lorsqu’ils découvrirent tous les trous creusés par les prospecteurs. Ceux-ci  s’installèrent en effet vite sous terre, dans les galeries désaffectées, pour se protéger des éléments et de l’extrême chaleur en été. Nous parcourons la ville à pied – mauvaise idée, les averses reprennent de plus belle en fin de journée – et visitons le petit musée souterrain d’Umoona qui présente l’histoire de la ville et des opales ainsi qu’une boutique avec de très beaux spécimens (vendus jusqu’à 100 000 AUD), qui brillent de mille feux multicolores. Un point de vue sur la ville nous confirme l’aspect désolé de l’endroit et la précarité apparente de certaines habitations, cabanes construites autour de caravanes dans des cours dénudées. Pas un arbre en vue. Nous terminons la journée par une visite de l’orphelinat de kangourous : les petits sont amenés ici après le décès de leurs mères, victimes d’accidents de la route ou de la chasse par les aborigènes. Une adorable petite femelle est nourrie au biberon par le directeur. Puis, il la sort de sa « poche » en tissu et la pose sur le sol pour qu’elle pratique la marche, mais la demoiselle est un peu frileuse et demande bien vite à réintégrer son sac.

 

A Coober Pedy, tout matériel est bon pour chercher des opales !

 

Panorama d’une ville qui ne fait pas rêver

 

Galerie souterraine

 

Après la nuit, nous continuons à rouler vers le Sud, ne nous arrêtant que pour déjeuner aux jardins botaniques de Port Augusta, qui offrent une superbe vue sur les Flinders ranges, la chaîne montagneuse principale de la région. Il nous faut une journée pleine pour atteindre Adélaïde, où nous sommes chaleureusement accueillis par Jan, notre hôte de couchsurfing pour les 3 nuits à venir, et son chien Flora, un mignon petit Bichon frisé tout blanc et plein d’énergie. Un succulent repas nous attend, accompagné de discussions passionnantes avec cette américaine installée à Adélaïde depuis plus de 50 ans, qui a aussi vécu 10 ans en Chine et au Japon. Les nuits sont froides, c’est l’hiver en Australie et la différence de climat entre le Nord et le Sud est flagrante, mais nous dormons comme des loirs dans un vrai lit.

Adélaïde

Nous passons deux jours à explorer Adélaïde, entre les rues piétonne du centre, la bande « culturelle » de North Terrace et le jardin botanique. La ville fut établie en 1836 en tant que première colonie libre d’Australie : tous les nouveaux arrivants étaient venus par choix, a contrario des villes fondées en tant que colonie pénitentiaires plus à l’Est (Sydney, Brisbane…). Le plan parfaitement quadrillé à l’anglo-saxonne comporte deux zones : Adélaïde et North Adélaïde, séparées par la rivièreTorrens et entourées d’une ceinture « verte » à but défensif, d’une largeur égale à la portée des canons de l’époque. Cette zone ne devait jamais être construire et a largement été convertie en jardins et parcs, donnant une touche de fraîcheur à la ville ; seules quelques installations sportives (dont le grand stade Oval) font exception. Le centre est animé et comporte de nombreuses boutiques, restaurants et cafés, qui nous rappellent un peu Melbourne.

 

Plan original d’Adélaïde, qui a très peu changé !

 

La cathédrale

 

« The Oval » : le stade discontinu, pour préserver des arbres classés !

 

Mais c’est dans les musées de la ville que nous passerons le plus clair de notre temps. L’Art Gallery of SA présente une collection intéressante d’art australien : on y voit comme les artistes ont commencé par chercher à représenter l’Australie comme leur Angleterre natale, dans des tons et un style qui ne correspond pas aux couleurs et lumières d’ici. Certaines salles mixent habilement art traditionnel aborigène, art classique australien et art moderne, mettant en regard des œuvres qui semblent dialoguer. Le South Australian Museum présente quant à lui des galeries scientifiques et ethnologiques : fossiles précambriens (les premières formes de vie existantes, ce qui est fait les plus vieux fossiles d’ « animaux » au monde), fossiles opalisés, minéraux, exploration antarctique, animaux… et sur deux étages, des objets aborigènes et des îles du pacifique. Les excellents guides bénévoles du musée nous font une visite « privée », aucun autre touriste ne s’étant montré ce matin ; leurs explications sont passionnantes et pleines d’anecdotes locales ou plus générales. On y apprendra notamment que toutes les pièces du musée ont été acquise honnêtement, par achat ou troc, contrairement à la plupart des musées européens dont les collections sont principalement composées de pillages archéologiques ou butins de guerres…

 

Collection d’art aborigène à la Art Gallery of South Australia

 

On dirait une fougère, et pourtant c’est le premier fossile d’animal !

 

Nous passons rapidement au musée de l’immigration, très bien faite, l’exposition décrit les différentes vagues de migrants, leurs motivations et leurs vies à travers les décennies. On y trouve aussi une expo sur l’immigration d’aujourd’hui, avec sa variété toujours croissante de profils et parcours. Pour notre dernière visite nous suivons un guide à travers la bibliothèque d’Etat. Elle est composée de trois bâtiments principaux : le bâtiment original de 1861 ( The Institue building), qui servait aussi de musée et galerie d’art avant que des bâtiments séparés soient construits ; l’aile de Mortlock ajoutée en 1884, son superbe hall à mezzanine abritant plus de 10 000 ouvrages dans des étagères en bois massif ; et l’aile moderne et ses équipements pratiques, archives et cartes anciennes.

Nous apprenons à mieux connaitre notre hôte et découvrons une personne incroyable, avec un parcours et des qualités très intéressantes, et une générosité extraordinaire. Nous discutons de nos vies, en Occident et en Asie, des différences de culture et linguistiques, de spiritualité et de méditation. Pour compléter le tout, c’est une cuisinière de talent et elle nous gâte avec des repas délicieux, nous n’aurions pas pu mieux tomber ! Pour notre dernier matin, nous allons bruncher à Penfold, un des vignobles historiques de la région, aujourd’hui encerclé par les banlieues en constante extension autour de la ville. Nous nous asseyons en terrasse, le café domine les vignes et les maisons en contrebas, et la belle journée qui s’annonce nous permet de voir très loin : toast à l’avocat et pain perdu accompagnent ce très bon moment.

 

La superbe salle de lecture de la Bibliothèque d’Etat

 

 

Mildura

Il ne faut que quatre heures de route pour rejoindre Mildura, et nous remontons tranquillement la vallée de la rivière Murray, la 3ème plus longue rivière navigable au monde. Nous faisons étape à Mildura, l’une des premières colonies d’irrigation ; cette ville a en effet été implantée en pleine zone aride, et a développé son agriculture et son économie grâce à un système d’irrigation extensif. Aujourd’hui c’est une petite ville de 30 000 habitants qui conserve quelques bâtiments et ouvrages de la fin du 19ème siècle : le grand hôtel, les cottages des premiers colons à s’installer, des écluses et barrages, les pompes et canaux d’irrigation… C’est pour nous l’occasion d’une petite croisière en bateau à aube à vapeur sur la calme rivière : ces embarcations étaient pendant longtemps les principaux moyens de déplacement et commerce des villes fluviales. Difficile d’imaginer qu’au rythme fou de 7 km/h il fallait près de 12 jours pour atteindre l’embouchure du fleuve… La chaudière avale les bûches de bois et la vapeur d’eau produite met en mouvement les pistons, qui entraînent eux-mêmes les grandes roues en bois accrochées de part et d’autre du bateau et qui le font avancer. Nous passons une écluse et continuons notre lente balade, il est plaisant de se laisser porter, bien emmitouflés en ce froid jour d’hiver. Nous passons le nuit à camper près de la rivière, faisons un bon feu de camp pour nous réchauffer : et c’est justifié, car la tente gèle pendant la nuit !

 

Au fil de l’eau…

 

Notre bateau à aube à vapeur: le paddlesteamer Melbourne !

 

Brume matinale sur la Murray River

 

Plus qu’une dizaine d’heures de conduite, qui passent un peu comme dans un rêve après toutes ces journées sur les routes d’Australie…  Et nous revoilà à Sydney dans le quartier de Bondi, où nous sommes hébergés par Guenièvre, une copine de promo, avec qui nous passons deux excellentes soirées à échanger sur nos vies et voyages ! Une dernière promenade sur le chemin côtier, un mélange d’excitation, de nostalgie et de satisfaction, nous assaille alors que nous nous remémorons ces trois mois en Australie et que nous nous préparons mentalement à notre prochaine étape, l’Amérique du Sud ! Une page se tourne…

 

Plus de photos d’Adélaïde, c’est par ici !

Plus de photos du road trip en South Australia et New South Wales, c’est par  !

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Infos pratiques

Transport :

  • D’Uluru à Coober Pedy : 8h30 pour 750 km, à travers un paysage de désert très plat.
  • De Coober Pedy à Adélaïde : 9h pour 850 km, arrêt à Port Augusta et détour par les Flinders ranges possible (non réalisé par manque de temps).
  • D’Adélaïde à Mildura : 4h30 pour 400 km, la route devient assez vite parallèle au cours de la rivière Murray, il est possible de s’arrêter dans une dizaine de petites villes fluviales.
  • De Mildura à Sydney : 11h et 1020 km, un gros morceau ! Nous l’avons coupé en dormant à Hay après notre journée à visiter Mildura, à 200 km à l’Est.

Hébergement :

  • Coober Pedy : The Clothes Barn, camping très basique (une simple cour rectangulaire) avec sanitaires et douches froides. 5 AUD par véhicule (tente et 2 personnes comprises). Wifi et quelques prises électriques disponibles.
  • Mildura : Kings Billabong park, camping gratuit sans installations. Accès par la route des Psyche Pumps, emplacement libre, nous avons choisi un bord de rivière.
  • Hay : Sandy Point Reserve, camping gratuit avec sanitaires, feux autorisés, un peu difficile d’accès sans 4×4 par temps de pluie.

 

Visites / activités :

  • Coober Pedy :
    • Umoona : musée gratuit, visite des habitations souterraines payante. Petit magasin avec quelques très belles pierres (jusqu’à 100 000 AUD !).
    • Josephine’s gallery : galerie et boutique d’opale. Orphelinat de kangourous avec séances de nourrissage et explications à 17h30 tous les jours. Gratuit (ou don libre).
  • Adélaïde :
    • South Australian Museum : gratuit, galeries aborigènes, d’animaux et de géologie…
    • Art Gallery of South Australia : gratuit, expo permanente de qualité.
    • Migration museum : gratuit, exposition assez petite mais intéressante
    • State Library : gratuit, visite guides quotidiennes à 14h.
    • Adelaide Oval : possible d’entrer voir le stade gratuitement, visite guidée des coulisses payante.
  • Mildura :
    • Chaffey Heritage Trail : circuit d’une dizaine de points historiques à travers la ville : cottages originaux, écluse et barrage, exploitations viticoles, système d’irrigation… Se renseigner à l’office du tourisme. Gratuit.
    • Croisières en bateau à aube à vapeur : sur la Murray river, tous les jours à 10h50 et 13h50. Départs du Mildura Wharf. Coût de 30 AUD par personne. Autres options de croisière certains jours ou périodes de l’année.

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