Arriver à La Paz est une expérience en soi : la route venant du lac Titicaca traverse pendant de longues minutes plusieurs banlieues résidentielles, le trafic se faisant de plus en plus dense. Puis, le plateau de l’Altiplano s’ouvre soudainement sur une dépression, une grande cuvette entièrement urbanisée : la ville s’étend à nos pieds, à perte de vue ! Bienvenue dans la plus grande ville de Bolivie, capitale économique et administrative, pleine de contrastes ! Nous passerons trois jours pleins ici : le premier dans le quartier du centre, le second 70 km au sud-ouest au site Tiwanaku et le troisième à la Vallée de la Lune et dans le quartier de Sopocachi.
Centre / Sopocachi
On avait tout entendu sur La Paz : à quel point la ville était sale, mal organisée, peu sûre… Autant dire que quand nous débarquons sous le soleil, notre première impression est plus positive qu’escomptée. Oui, la circulation est très dense : c’est une grande ville sud-américaine. Oui, une partie de la population est pauvre et les bâtiments assez décrépis : la Bolivie est le pays le plus pauvre d’Amérique du Sud. Mais les habitants sont plutôt agréables, le patrimoine architectural riche et les rues pleines de vie !
Détail d’importance pour notre souffle, La Paz est la capitale la plus haute du monde, à 3660 mètres d’altitude ! Nous commençons par remonter doucement l’avenue principale qui traverse la ville du Nord au Sud, le Prado. La largeur de l’artère et son positionnement central en font une promenade de choix, bordés de magasins plutôt chics, de restaurants et casinos : les Champs-Elysées boliviens en somme ! Nous débouchons sur la place San Francisco, dominée par l’église et le couvent du même nom, dont la façade baroque richement sculptée présente quelques éléments locaux : fruits, animaux, bustes indigènes… L’étroite rue Jaen est un bel exemple d’architecture coloniale, alignant les maisons aux façades peintes de couleurs vives. Quatre musées y sont installés : le musée des coutumes présente les fêtes et traditions locales sous formes de scénettes et figurines, le musée du littoral dont le nom peut surprendre pour un pays enclavé retrace justement l’histoire de la région côtière anciennement bolivienne mais conquise par les forces armées chiliennes en 1883, le musée des métaux précieux montre des artefacts précolombiens en métaux précieux et enfin la maison musée de Murillo rend hommage aux débuts de la démocratie dans le pays et à l’un de ses révolutionnaires indépendantistes les plus influents.
Plaza Murillo
Facades colorées de la calle Jaen
Les marchés de La Paz sont vivants et pleins de couleurs : le samedi est le jour le plus animé et nous avons la chance d’être en ville ce jour-là. Le marché dit « noir », n’y voyez pas de connotation illégale, occupe plusieurs blocs d’immeubles et les rues adjacentes. On y trouve de tout : des denrées alimentaires de base (fruit, légumes, viande), industrielles (gâteaux, épicerie, sucreries), des produits d’hygiène, des outils, des jeux, des vêtements, des chaussures, des livres et j’en passe… Est-ce le fruit du hasard ou une coutume hebdomadaire, nous ne le savons pas, mais toujours est-il que des groupes de danseurs costumés accompagnés de fanfares défilent également dans les rues au son d’une musique entraînante. Le marché de sorcellerie est censé être l’un des favoris des touristes pour son caractère ésotérique et la variété de produits improbables proposés : dimanche matin, seuls quelques stands timides sont ouverts et ne nous ferons pas grande impression. On y trouve néanmoins des fœtus de lama à enterrer sous les nouvelles maisons pour leur porter chance (pensez-y pour votre prochaine crémaillère !) et des mixtures à la composition inconnue pour tous les maux possibles et imaginables, accompagnés de photos peu ragoutantes.
Stands au marché « noir »
Parade dans les rues du marché
Le changement est en marche, ici aussi, en témoigne les travaux en cours partout dans la ville et notamment le nouveau moyen de transport public mis en place : El Teleferico ! Ce système de transport par câble sillonne la ville : après les trois lignes initiales aux couleurs du drapeau national (rouge, vert et jaune), cinq nouvelles lignes sont attendues dans les mois et années à venir. Le téléphérique s’affranchit des contraintes du terrain de de l’urbanisme en survolant les rues et constructions, et permet notamment de rejoindre les quartiers du plateau en hauteur rapidement et efficacement. Pour nous, c’est surtout l’occasion d’apprécier une jolie vue sur la ville et de se laisser flotter au-dessus des embouteillages permanents…
Le téléphérique descend dans la cuvette de La Paz
Le quartier de Sopocachi est quant à lui l’endroit où trouver les restaurants et bars tendance, les vitrines bobos se succèdent et l’ambiance branchée se distingue clairement du reste de la ville. Véritable gemme nichée au cœur de ces rues, la maison-musée Solon regroupe une collection des œuvres de l’artiste dans les murs de son ancien lieu de résidence. Don Quichotte est le fil rouge de ses créations, incarnant la lutte contre l’oppression au sens large et les violences des différents régimes. Les dessins sont fait de nombreux traits continus et tarabiscotés, qui mis ensembles forment une image d’une grande vitalité : une superbe expo dont nous nous rappellerons longtemps.
Maison-musée Solon, artiste engagé
Tiwanaku
Tiwanaku, le principal site précolombien de Bolivie, est situé à 70 km au sud-ouest de La Paz, en direction de la frontière de Desaguadero avec le Pérou. La grande civilisation du même nom domina la région pendant quelque 22 siècles, découpés en 5 périodes principales. Le site archéologique date principalement de la période Tiwanaku IV, la dernière en expansion avant la décadence des Tiwanaku V. Le site est assez étendu et comporte plusieurs temples et structures, parmi lesquels se distinguent la pyramide centrale d’Akapana, un temple semi souterrain, le temple principal de Kalasasaya et le temple de Putuni. La première occupe une place majeure et permet d’embrasser d’un seul regard tous les autres lieux. Le temple semi-enterré est dédié au monde « d’avant » et « d’en-dessous », en lien notamment avec le culte de la Lune. Le temple principal de Kalasasaya est consacré au soleil et celui où se déroulaient la majeure partie des cérémonies publiques : on y célèbre le « présent » et la lumière. Le temple de Putuni, enfin, est avant tout un lieu de sépulture, les corps des défunts importants étant placés dans des cellules disposées sur le pourtour d’une pièce carrée, non visible depuis l’extérieur : c’est le lien avec le monde « d’après ».
Temple de Kalasasaya dédié au soleil
Temple semi-souterrain et ses dizaines de têtes-clous
Les deux musées présentent de nombreux objets trouvés pendant les fouilles : des poteries d’usage quotidien et cérémoniel d’une grande variété et un important nombre de sculptures (frises, « totems », têtes-clous encastrées dans les murs, etc…). La civilisation Tiwanaku a eu une grande influence sur toute cette partie des Andes aujourd’hui devenue la Bolivie, et on retrouve leur influence stylistique chez plusieurs peuples voisins ou ultérieurs. Les raisons de la décadence de ce peuple restent mystérieuses et pourraient être liées à des conflits internes, un changement climatique ou des évènements météorologiques particulièrement destructeurs : une chose est sûre, ils avaient déjà disparu à l’arrivée des incas au XIVème siècle. Plus étonnant, le peuple Aymara, qui est aujourd’hui majoritaire dans la région et continue de pratiquer sa langue et ses coutumes, aurait été une caste inférieure sous l’empire Tiwanaku et qui serait montée en puissance à la disparition de ceux-ci !
Bas-relief de la « porte du soleil »
Valle de la Luna
Excursion facilement réalisable à la demi-journée depuis le centre, le site de la Vallée de la Lune mérite un détour pour ses impressionnantes formations géologiques. Le site, sculpté par la pluie et le vent à travers les âges, présente aujourd’hui des milliers de colonnes de terre qui semblent former un labyrinthe impénétrable. Les rayons du soleil frappent fort sur ce sol stérile et la chaleur devient vite insupportable ; nous parcourons les cheminements d’un pas pesant et lent, sous le ciel lourd. Le site est finalement assez peu étendu mais le circuit permet d’observer différents points de vue en prenant de la hauteur et de varier les panoramas et photos. Alors que nous nous apprêtons à rentrer, un vent violent se met à souffler, apportant avec lui de sombres nuages : et soudain, c’est le déluge, une pluie torrentielle s’abat sur nous et nous force à nous mettre à l’abri, il est bien l’heure de partir !
Sentier dans la Valle de la Luna
Entre cactus et « dent du diable »
Plus de photos de La Paz, c’est par ici !
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Infos pratiques
Transport :
- De Copacabana à La Paz : les bus partent de la place centrale, avec une fréquence plus élevée le matin. Compter 25 BOB pour le trajet en bus (durée de 3h jusqu’à l’entrée de l’agglomération, 4h jusqu’au terminus au Cementerio) + 2 BOB pour la barge qui traverse le détroit de Tiquina environ 1h-1h30 après être partis de Copacabana.
- De La Paz à Sucre : bus de nuit uniquement, plusieurs départs entre 18h et 21 En bus « semi-cama » très confortable, billet à 100 BOB par personne. Durée 12h30.
- De La Paz à Rurrenabaque : bus de nuit uniquement, départ à 14h de la Calle Virgen del Carmen dans le quartier de Villa Fatima. Plusieurs compagnies proposent le trajet, nous avons pris Vaca Diez qui avait un confort correct. Durée 15 heures, arrivée 6 heures du matin à Rurrenabaque. Pause dîner prévue à Caranavi mais nous avons préféré prendre nos provisions et pensons avoir bien fait. Coût de 70 BOB par personne.
- De La Paz à Tiwanaku : près du cimetière, prendre n’importe quel minibus à destination de Desaguadero (coût 15 BOB par personne). Vous serez déposés à l’embranchement de la route nationale, à environ 2 km des sites archéologiques. Une courte course en taxi (10 BOB) peut vous éviter la marche en plein soleil. Pour revenir, prendre le minibus sur la place centrale du village. Tip : il est plus rapide de s’arrêter à El Alto et de prendre le téléphérique (bleu puis rouge) que d’aller en minibus jusqu’à l’arrêt Cementerio !
- De La Paz à Valle de la Luna : prendre n’importe quel bus à destination de Mallasa depuis le centre et demander à descendre à « Valle de la Luna ». Durée 1 heure. Coût 2,50 BOB par personne. Au retour, bus irréguliers ; prendre n’importe lequel qui se dirige vers le centre.
Hébergement :
B&B Piacere : situé entre le centre et Sopocachi, les deux quartiers sont accessibles en 15 minutes à pied. Chambre confortable et bien aménagée. Une des salles de bain en rénovation à notre passage, celle du rez-de-chaussée est moins agréable mais la douche est bien chaude. Petit déjeuner copieux et plutôt bon, cuisine pratique à disposition. Coût 129 BOB pour une chambre double avec salle de bain commune (réduction booking.com).
Visites / activités :
- Tiwanaku : les 4 sites inclus dans le ticket d’entrée sont musée de céramique, musée lithique, site principal et la pyramide de Pumapunku. Entrée à 100 BOB par personne.
- Valle de la Luna : Un paysage original et des circuits pédestres de 15 minutes à 1 heure possibles. L’entrée comprend également l’accès au jardin de cactus, fermé lors de notre passage. Coût 15 BOB par personne.