Los Nevados – On a marché sur le glacier

La ville de Manizales est tout en dénivelé : son centre historique se trouve en haut d’une colline escarpée, et la ville a peu à peu colonisé ses flancs, jusqu’à la vallée, et la colline de l’autre côté de la rivière également. Sa topographie, son climat frais et sa localisation au centre de la zone cafetière rendent le bourg agréable. Mais c’est surtout la proximité du Parc Naturel de Los Nevados qui en fait une localité en plein développement touristique.

 

Le Bolivar aquilin de la place principale de Manizales

 

Et ses rues commerçantes

 

Le parc comporte sept sommets principaux, volcans toujours en activité. Le sommet du Ruiz, qui était accessible à pied il y a encore une dizaine d’année, est en ce moment entouré d’un périmètre de sécurité du fait d’une activité volcanique accrue depuis 2012. Il n’est donc plus possible d’approcher trop près, et les excursions dans cette zone du parc se limitent à un tour en 4×4 avec plusieurs arrêts, de sorte à pouvoir évacuer les touristes au plus vite en cas d’alerte. Le cratère actuel de Las Arenas fume doucement, et oblige même l’aéroport de Manizales à fermer plusieurs fois par an lors d’épisodes de fumerolles plus intensives. Le risque n’est en effet pas à prendre à la légère : en 1985, le dernier accident majeur fit plus de 25 000 morts, principalement en raison des coulées de boue créées par la fonte des glaciers suite au réchauffement de surface provoqué par l’éruption.

C’est donc son voisin, le volcan de Santa Isabel, que nous nous préparons à grimper. L’accès au sentier est assez difficile, une grosse journée nous attend. 4h, le réveil sonne et nous sautons dans nos vêtements de randonnée. 4h30 le guide et le chauffeur de 4×4 viennent nous récupérer à notre hôtel, puis nous passons chercher cinq autres touristes pour compléter notre groupe : un jeune couple de Nîmois, un espagnol et deux colombiens, répartis dans deux voitures. Nous faisons une pause-café relativement peu utile pour nous mais sans doute indispensable au chauffeur. Et c’est parti pour 2 heures de piste, dont la moitié alors que le soleil n’est pas encore levé… le paysage est presque irréel, se découvrant à travers les brumes dans la lumière du petit matin. Nous longeons une vallée encaissée sur notre droite et les nombreux nids de poules font osciller la voiture de manière plus ou moins sûre.

Nous profitons de la vue sur la cascade du Rio Otun, juste devant notre premier panorama sur les sommets des Nevados, avec les cratères de El Ruiz en toile de fond. C’est l’heure du petit déjeuner, que nous prenons à la ferme La Laguna, dans un cadre charmant : arepas, œufs, fruits, accompagnés de café. Dans la cour, un bœuf de bât est chargé de produits fermiers et attend placidement le prochain déplacement. Nous partons repus pour une autre heure et demie de route, dont une courte pause à la cabane du garde-forestier pour s’enregistrer – question de sécurité – et écouter un rapide briefing sur le parc naturel et les dangers volcaniques. Il est donc 9h30 quand nous commençons enfin notre ascension, et nous partons déjà de très haut : la ville de Manizales est à 2150 mètres d’altitude, et le début du sentier à … 4100 mètres ! Nous sentons tout de suite les effets du manque d’oxygène sur nos corps, nos cœurs se mettant à pulser frénétiquement au moindre dénivelé. Et devinez-quoi, ce n’est que de la montée à partir de maintenant, donc notre palpitant est mis à rude épreuve. Heureusement, notre guide Fabian fait des pauses régulièrement pour nous laisser reprendre notre souffle et nous donner des explications sur le paysage, la flore et la faune qui nous entourent.

 

Paysage de paramo et ses typiques frailejones

 

Etang de transition en cours d’assèchement

 

Alors que la route passaient principalement à travers de la forêt andine, le sentier démarre dans l’écosystème de paramo, cet environnement de montagne qui n’existe qu’en Amérique latine tropicale. Des frailejones (espeletia en français), sortes de mini-palmiers dont les feuilles à la douce texture composent le tronc au fur et à mesure de leur mort (à hauteur de 3 cm par an seulement), marquent le paysage de leur silhouette étonnante. De nombreux lacs transitoires, qui n’existent qu’en saison humide et ont office de tampons pour l’ensemble de la prairie, sont en train de s’assécher et de retourner à l’état de petites clairières. Le temps est nuageux et la brume donne une ambiance presque mystique à l’ensemble, renforçant le côté surréel de l’effort. De nombreuses plantes ont des vertus médicinales : de l’arnica (aux fleurs voilettes !) pour les coups et articulations, des bresitas aux petites fleurs oranges vifs pour les maux de ventre, divers types d’herbes pour les problèmes d’estomac ou de tension, et de la valériane pour ses effets calmants.

 

On grimpe pour atteindre le super-paramo

 

Brume et miroirs d’eau

 

Le parc est peuplé de cônes volcaniques

 

Nous arrivons ensuite dans le super-paramo, et les frailejones disparaissent au profit d’arbustes plus petits et plus secs. Un léger mal de tête commence à poindre, mais nous ne sommes plus très loin du but. Après 2h30 d’effort, nous atteignons dans un épais brouillard une zone complètement dépourvues de végétation : il y a quelques années, le glacier s’étendait jusque sur ces rochers nus, mais le réchauffement climatique l’a vu reculer au rythme fou de plus de 40 mètres par an. Quelques étangs aux eaux laiteuses pleines de poussière de roche, typique des eaux de fonte de glacier, sont parsemés ici et là. Et nous atteignons enfin le glacier, à une altitude de 4740 mètres, presque le Mont Blanc ! Nous ne pouvons pas nous aventurer très loin sans équipement spécifiques, le risque de disparaitre dans une crevasse est réel, mais faisons quand même une cinquantaine de mètres sur la glace. Celle-ci est loin d’être immaculée comme on pourrait l’imaginer, elle est parsemée de petits cailloux et poudre noire, le vent déposant régulièrement des cendres sur la masse blanche. Il n’y a que lors d’une chute de neige fraiche que l’ensemble est parfaitement blanc ! La surface crisse sous nos pieds et après une session photos nous redescendons avant que le mal des montagnes n’empire. Daphné commence en effet à avoir une légère nausée et nos pensées sont assez nébuleuses…

Nous voilà arrivés ! 

 


Le glacier… un peu irréel et surtout constellé de particules noires !

 

La descente est bien plus aisée et en à peine 4 heures au total de marche, nous sommes de retour au 4×4. Un petit snack pour couper la faim nous est servi, et nous reprenons la route. Nous croisons en redescendant une course cycliste et ne pouvons qu’être admiratifs de l’effort fourni, surtout à cette altitude ! Nous nous arrêtons à la ferme du matin pour le déjeuner : outre la joie de remplir nos estomacs criant famine, c’est un vraiment bon moment où nous échangeons avec diplomatie avec nos compagnons colombiens sur des sujets polémiques concernant l’Europe, l’immigration, les évènements actuels au Venezuela ou encore les accords de paix récents avec les FARCs… c’est l’avantage d’avoir un groupe mixte entre touristes locaux et étrangers. L’un des chats de la ferme se love sur les genoux de Daphné alors que nous concluons le repas par une tasse de café.

Mais attention, ce n’est pas fini ! Il reste deux heures de piste et nous encaissons tant bien que mal les derniers cahots de la route. Le second 4×4 en revanche prend un choc inattendu et… casse la barre de direction !  C’est l’épisode « McGiver en Colombie », tous les accompagnants y allant de leur suggestion pour résoudre la situation. C’est finalement l’option « j’attache le restant de barre au pare-chocs avec une ceinture » qui est choisie, mais les essais qui suivent ne sont pas probants et quant à nous, nous n’aurions même pas essayé de faire rouler l’engin « réparé » si proche du précipice. Pour finir, les touristes sont tous mis dans le 4×4 indemne en mode sardines, et nous abandonnons le guide et le second 4×4 à leur triste sort sur le bord de la piste. C’est donc vers 19h et bien après la nuit tombée que nous retrouvons enfin notre hôtel. Où, devinez-quoi, une coupure générale d’eau a lieu depuis l’après-midi ! Adieu, rêve d’une douche chaude amplement méritée, nous dînons et tombons bien vite dans les bras de Morphée.

 

Plus de photos de Manizales et Los Nevados, c’est par ici !

 

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Infos pratiques

Transport :

  • De Medellin à Manizales : du terminal sud, des bus partent toutes les heures, pour une durée théorique 4h (pour nous 5 heures). Coût : 30 000 COP par personne.
  • De Manizales à Salento : pas de bus direct, le premier tronçon de Manizales à Pereira dure environ 1h15 et coûte 10 000 COP par personne. Le second tronçon de Pereira à Salento dure 1h et coûte 7000 COP par personne.

Hébergement :

  • Minga House : auberge familiale de 6 chambres, avec salles de bain communes, impeccable. Cuisine à disposition des invités. Hôte agréable même si très présente. Tarif de 45 000 COP par nuit pour une chambre double avec petit déjeuner inclus.

Visites / activités :

  • Randonnée au Parc Naturel de Los Nevados : organisée avec l’agence Ecosistemas, 180 000 COP par personne. Assez cher pour une seule journée mais justifié au vu des prestations (6 heures de 4×4, petit déjeuner et déjeuner inclus, guide, frais d’entrée au Parc National). Entre 4 et 6 heures de marche. Prendre des snacks car le déjeuner est servi très tard.

2 réflexions au sujet de « Los Nevados – On a marché sur le glacier »

  1. Bonjour,
    je ne comprends pas, je croyais que vous étiez deux mais en fait vous voyagez à trois avec Morphée, vous l’avez connue comment?

    DIDIER

    1. Hello Didier !
      Haha oui, incroyable, nous la retrouvons tous les jours, elle nous colle aux baskets depuis la Chine !
      Ceci étant dit, comme ce voyage est une sorte de long rêve éveillé, ce n’est pas forcément surprenant 😉
      D&J

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