Sucre – Capitale tout en douceur

Capitale politique et culturelle de Bolivie, Sucre nous offre l’occasion de faire le plein de connaissances et de satisfaire notre curiosité. La ville est agréable à parcourir à pied, alignant bâtiment coloniaux et édifices plus neufs et se prête à flâner entre les marchés, les parcs et les placettes. C’est également l’occasion de prendre un peu de repos, de retrouver le rythme du voyage et de planifier la suite, après notre longue étape dans la jungle.

Les musées ne manquent pas et il nous faut faire un choix. Nous démarrons par le Museo Nacional de Etnografia y Folklore : on y trouve plusieurs expositions assez ciblées sur certains pans de la culture bolivienne. La première partie fait la part belle à des retables portatifs, de quelques dizaines de centimètres de haut seulement, utilisés par les colons pour évangéliser le nouveau monde de la manière la plus efficace possible : avant de construire des églises partout, il suffisait de déplacer les images saintes dans ces petites caisses sur les lieux où se prêchait la bonne parole. Tradition qui s’est perpétuée jusqu’à aujourd’hui, la fête des Alasitas a lieu chaque année pour invoquer la bonne fortune : on offre alors à l’Ekeko, un nain porte-bonheur, des miniatures de tous les objets souhaités sur les 12 mois à venir. Les vitrines sont ingénieusement agencées en suivant les évolutions culturelles à travers les décennies au moyen du prisme des petites choses désirées et modélisées : produits alimentaires, documents, immobilier, monnaie… Une autre section est consacré à l’habillement traditionnel des femmes boliviennes et notamment au « topo », cette broche qui sert à fixer les châles en laine autour des épaules et du buste, et accessoirement à se défendre en cas d’attaque, sa longue extrémité affilée pouvant aisément être utilisée comme poignard.

 

Un Ekeko et son fardeau de porte-bonheurs

 

Le fameux chapeau de feutre bolivien, richement décoré !

 

Le Museo ASUR présente quant à lui plusieurs aspects de l’art indigène de la région. La majeure partie de l’exposition est dédiée aux textiles, typiques des cultures Jalq’a et Tarabuco des vallées voisines. Le tissage crée des motifs d’une extrême finesse en fils rouges et noirs, dessinant des figures entrelacées d’une grande complexité pour former un tableau entier impressionnant. Plus récemment, la technique de la tapisserie a également été utilisée pour créer des ensembles plus colorés et plus figuratifs. On découvre également le cycle des saisons dans cette partie de l’Altiplano et les danses rituelles correspondantes : chacune implique un type différents de costumes, de musique et de danses. A deux pas du musée, la place de La Recoleta et son point de vue sur la ville en contrebas méritent un coup d’œil.

La Casa de Independencia retrace l’histoire du pays, de sa déclaration d’indépendance le 6 aout 1825 à aujourd’hui. La visite démarre par une salle sur la guerre contre les colons espagnols, mettant à l’honneur les héros Juana Azurduy et Manuel Padilla, époux qui sacrifièrent tout (jusqu’à 4 de leurs 5 enfants) sur l’autel de la Patrie. Le maréchal Sucre, qui donna son nom à la ville où nous sommes, est l’une des autres grandes figures de l’histoire du pays. Une mention rapide est faite des différentes guerres qui opposèrent la Bolivie à ses voisins : elle n’en est jamais sortie victorieuse, ce qui aboutit à une réduction de son territoire de moitié au profit du Pérou, du Brésil, du Paraguay, du Chili et de l’Argentine. Nous finissons par la galerie des portraits des 65 présidents en 200 ans d’existence du pays, dont pas moins de la moitié issus du monde militaire acquirent leur titre au moyen d’un coup d’état violent (!).

 

Le Maréchal Sucre entouré de drapeaux boliviens

 

Autour de la Plaza de Armas

 

Le meilleur moyen d’apprécier le patrimoine de la ville est encore sans doute de prendre de la hauteur : c’est possible au Museo-iglesia San Felipe, dont les toits sont accessibles et offrent un panorama splendide sur la ville. Les façades blanches et les tuiles nous entourent et nous offrent un très beau spectacle en cette fin d’après-midi, la lumière chaude rehaussant l’architecture fine.  L’ancien couvent a un classique plan carré organisé autour d’un patio intérieur, entouré d’un couloir ouvert d’arches sur lequel sont distribuée les salles : aujourd’hui le lieu héberge une école. Parmi les autres curiosités de la ville, on notera la tour Eiffel miniature de couleur orange installée au centre du parc Bolivar et effectivement conçue par le célèbre ingénieur français, au même titre que la gare routière de La Paz.

 

Les toits de Sucre

 

Mini-tour Eiffel, feels like home

 

Quelques élégants bâtiments néoclassiques côtoient les maisons coloniales

 

Potolo

C’est le hasard (ou la pingrerie ?) qui nous a mené à Potolo : l’office du tourisme proposant des excursions gratuites vers ce village ethnique le samedi, nous nous sommes laissés tenter. La journée démarre par une marche d’environ 2 heures entre les villages de Chataguila et Chaunaca, suivant un chemin précolombien très bien conservé. Une petite église en pierre marque le début du parcours, à 3600 mètres d’altitude. La journée et belle et le paysage splendide. Le sentier épouse la topographie, longeant les montagnes en descendant régulièrement en pente douce. Au loin, la Cordillera de los Frailes se dessine, alignant crête montagneuse sur crête montagneuse. Nous en aurons une vue encore meilleure depuis la route un peu plus loin, une fois remontés dans le bus.

 

L’église de Chataguila

 

Un beau panorama le long du chemin précolombien

 

A Potolo, nous visitons le centre d’interprétation Jalq’a : on nous explique les fêtes traditionnelles, les méthodes de tissage, les habits locaux, etc… La diction est hésitante et l’accent fort, on sent que la visite guidée est encore en rodage. Suit un déjeuner local : une soupe lagua de chicha (à base de maïs dans une sauce de tomate, oignons, herbes), un plat de blé (dont la sauce ressemble étrangement à celle de la soupe), accompagnés de lait de soja. Pour l’anecdote, la soupe est chauffée en y balançant des pierres qui ont auparavant accumulé de la chaleur dans un brasier : ça fait plouf, psschhittt et ça fume. Deux autres petites salles nous présentent les plantes médicinales utilisées depuis des siècles par les indigènes pour se soigner et la tradition du curandero, une sorte de chaman local qui guérit et devine également le futur avec des feuilles de coca. Pour finir, cinq hommes font une démonstration de danse traditionnelle : trois « coccinelles » avec des ailes métalliques tapent du pied en dansant en rond autour d’un musicien qui joue du pipeau et du tambour, pendant que le dernier incarne un cavalier qui tourne autour de tout ce joli monde en les fouettant. Nous quittons les lieux avec une impression mitigée : on sent bien que l’initiative est balbutiante et l’ensemble ne présente pas un intérêt démentiel, mais cette région est l’une des plus pauvres du pays où il faut encourager les initiatives touristiques permettant de diversifier les sources de revenus, et les différents éléments sont présentés avec application, une recherche certaine de l’appréciation du visiteur et des sourires francs en réponse à nos remerciements et commentaires. On nous demandera même de réaliser une « interview » filmée à la fin de la visite, expliquant pourquoi nous étions venus et si nous avions apprécié l’expérience, à laquelle nous répondrons avec une honnêteté toute relative devant l’assemblée pendue à nos lèvres et les regards inquiets en quête d’un retour positif…

 

Tisserandes Jalq’a

 

« Coccinelle » dansante

 

Cette étape a également été pour nous une transition pour nous remettre dans le voyage. Après 2 semaines et demie dans la jungle près de Rurrenabaque, et deux bus de nuit épuisants pour atteindre Sucre via La Paz, nous avions besoin de quelques jours pour gérer les aspects pratiques et rattraper notre retard sur Internet. Notre durée de séjour autorisée à l’entrée à Copacabana étant de 30 jours, nous avons commencé par faire étendre notre visa au bureau de l’immigration : une formalité étonnamment simple et gratuite, qui nous a pris 15 minutes y compris le temps de faire les photocopies nécessaires. Nous devions également planifier la suite de nos aventures, ceci à court terme sur les deux mois restant de ce long voyage avant notre retour en France pour les fêtes, comme à long terme sur le choix de notre prochain lieu d’installation et de travail. A ce titre, l’agréable patio de l’hôtel et les belles balades à travers la ville et ses alentours auront été propices à l’avancée de notre réflexion !

 

Plus de photos de Sucre, c’est par ici !

 

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Infos pratiques

Transport :

  • De La Paz à Sucre : bus de nuit uniquement, plusieurs départs entre 18h et 21h. En bus « cama » très confortable, billet à 100 BOB par personne. Durée 12h30.
  • De Sucre à Potosi : bus réguliers au cours de la journée, superbes paysages désertiques traversés. Coût 20 BOB + 2,5 BOB de taxe de terminal par personne. Durée 3h30.

Hébergement :

  • Hostal Don Manuel : au bout d’un passage qui part de la calle Aniceto Arce, entre Avenida Siles et Urcullu. Une belle trouvaille : patio agréable, wifi correct pour la Bolivie, douche chaude (bien que rustique), chambres propres et plutôt confortables (bien qu’un peu sombres) et cuisine à disposition. Coût de 70 BOB pour une chambre double avec salle de bain commune.

Visites / activités :

  • Museo Nacional de Etnografia y Folklore : intéressante collection et exposition temporaires sur la culture bolivienne. Gratuit.
  • Museo de Arte Indigena (ASUR): très belle exposition de tissus et costumes indigènes. Photos malheureusement interdites… Coût de 22 BOB par personne.
  • Convento San Felipe : entrée par l’école au 165 Calle Ortiz. Superbe vue depuis le toit. Coût de 15 BOB par personne.
  • Casa de la Independencia : ouvert normalement de 9h à 12h puis de 14h30 à 18h30 du mardi au samedi et de 9h à 12h le dimanche mais notre expérience prouve que ces horaires sont plus que flexibles, la maison ayant été fermée lors de notre visite toute la journée du jeudi au samedi et ouverte seulement jusqu’à 11h le dimanche… Guides de très haute qualité néanmoins ! Coût de 15 BOB par personne.
  • Tour à Potolo : le samedi, organisé par l’office du tourisme. Transport gratuit lors de notre passage, mais le projet était en cours de lancement et cela peut changer très vite, avec un prix d’appel possible aux alentours de 180 BOB. Inclus la randonnée sur le chemin inca de 2 heures entre Chataguila et Chauca, la visite du centre et un repas traditionnel. Coût des entrées par personne: 10 BOB pour le chemin + 35 BOB pour le centre et le repas.

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