Battambang – Le charme provincial

Arriver à Battambang, c’est découvrir un autre visage du Cambodge, ou comment la 2ème ville du pays, un peu à l’écart des principaux circuits touristiques, garde un charme provincial et un rythme de vie tranquille. Tout semble s’y dérouler plus doucement, et les transformations lentes de la ville ont ainsi su conserver le patrimoine architectural colonial tout en développant de nouvelles infrastructures et de nouveaux quartiers en harmonie avec les anciens.

Battambang a une histoire architecturale riche et nous suivons avec intérêt deux circuits téléchargés sur Internet, qui nous emmènent à travers les rues découvrir le passé et le présent de la ville à travers ses bâtiments. Ceux-ci nous amènent d’abord aux « shophouses » de style colonial en front de rivière, avec leurs arcades et petits commerces au rez-de-chaussée. Nous continuons par les temples et écoles chinoises, cette communauté étant très importante au Cambodge, puis un certain nombre de bâtiments officiels (département de l’agriculture, du tourisme, etc…) logés dans d’anciennes villas coloniales rénovées. Les temples bouddhistes ne sont pas en reste, entre le Wat Kampheng et le Wat Phiphétaram, et leur style élancé et toits ornementés de cornes nous rappellent la Thaïlande. Au sud de la ville, le palais du gouverneur et la résidence royale (utilisée uniquement quand les monarques visitent la ville) trônent au milieu d’un joli parc arboré. La rivière est également très présente dans l’urbanisme de la ville et il fait bon se promener sous les arbres surplombant l’eau. En cette saison sèche, le niveau de l’eau est très bas et la large emprise de la rivière est couverte de végétation.

 

Cambodge ou Rome antique ?

La résidence du gouverneur

 

Les moines aussi font des emplettes

Les environs de la ville se prêtent très bien à une exploration à vélo ou scooter, et c’est l’option motorisée que nous choisissons, afin de couvrir un plus grand périmètre. Nous commençons par un tour en « train de bambou » : la ligne ferroviaire construite par les français étant tombée en désuétude pour les trains normaux, les locaux l’utilisaient sur certains tronçons avec des petits chariots en bambou posés sur des essieux. Aujourd’hui, c’est surtout une attraction touristique et seuls subsistent 4 kilomètres de voie en ligne droite à travers la campagne, ne reliant aucun site d’intérêt, les deux terminus n’étant que de minuscules hameaux.  On y vient pour l’expérience, le roulis du « train » sur les voies, le cliquetis des rails, la jungle dense, les petits ponts branlants, le vent dans les cheveux, et l’opportunité de croiser un autre train : comme il n’y a qu’une seule voie, il faut alors démonter et remonter l’un des deux wagons, les passagers attendant sagement sur le bas-côté, chaque « train » pouvant emporter jusqu’à 6 personnes en sus du chauffeur !

Juste au sud de la ville de Battambang se trouve le village Wat Kor, étendu le long de la rivière, qui comporte beaucoup de maisons traditionnelles en bois. Deux d’entre elles, parmi les plus grandes et les plus riches, se visitent. Le neveu de la propriétaire de la maison Bun Roeung nous accueille dans un français parfait et nous fait partager l’histoire de la maison ainsi que de très intéressants points de vue sur la conservation du patrimoine khmer et l’évolution du pays. La maison, propriété d’un ancien général, fut un temps réquisitionnée par les khmers rouges pour servir de cantine communale, laissant des traces indélébiles dans le bois centenaire, comme dans la chair des habitants…  La vieille propriétaire de la maison voisine, Khor Sang, nous gratifie également d’un très poli « bonjour Madame, bonjour Monsieur », avant de nous guider à travers les pièces en détaillant les particularités de sa maison dans un français impeccable : nous sommes impressionnés par son énergie malgré les années que trahissent son dos courbé.

A bord du bamboo train !

L’une des maisons traditionnelles du village Wat Kor

C’est reparti ensuite pour une vingtaine de kilomètre en scooter sur une belle route à travers la campagne, le paysage se fait très rural dès les premières minutes. Nous dégustons notre repas le moins cher du Cambodge dans une échoppe sur le bas-côté, une soupe de nouilles avec de la viande pour 0,75 dollar. Arrivés au Phnom Banan, nous gravissons quelques dizaines de marches pour atteindre en haut de la colline un plateau sur lequel se dressent cinq tours de style pré-angkorien (8e ou 9e siècle). Des étais en bois supportent par endroits les structures, l’état de conservation du site étant assez variable. Quelques bas-reliefs attirent l’œil : des apsaras (danseuses) et autres figures de petits bonhommes gravés dans la roche. Au milieu des ruines poussent des cactus et de grands arbres, donnant un air d’aventure à la courte balade à travers les vestiges : c’est une belle introduction aux temples anciens, avant d’attaquer Angkor dans quelques jours.

Le temple Phnom Sampeau mérite également un arrêt, moins pour les stupas modernes que pour la vue sur les alentours : paysage typiquement cambodgien, la campagne s’étire, toute plate, à perte de vue, ponctuée de palmiers et de démarcation entre les champs et rizières. Des grottes se visitent, l’une d’entre elles tristement célèbre en tant que « killing cave », charnier des khmers rouges pendant leurs terribles années de domination. En bas se déroule tous les soirs un spectacle magique : à la tombée de la nuit, des dizaines de milliers de chauve-souris sortent de la grotte où elles dorment pendant la journée, formant un ruban continu pendant plus de 30 minutes ! Le ruban se contracte et se détend au rythme de lentes ondulations, les chiroptères se comportant à la fois individuellement et collectivement, comme un animal gigantesque.

Un petit air d’Indiana Jones au Phnom Banan

Vue depuis le Phnom Sampeau

 

Le ruban des chauve-souris partant en chasse nocturne

Nous consacrons aussi une demi-journée à une découverte plus approfondie de la gastronomie cambodgienne, grâce à un cours de cuisine locale ! Après une courte visite du marché, nous nous attelons à la préparation, sous les instructions et l’œil attentif de Lyly, le chef du restaurant. Formé à Sem Reap dans une école hôtelière française, nous sommes impressionnés par son professionnalisme et attention portée au détail. Nous choisissons 4 plats parmi 10 et les préparons en discussion avec le sympathique chef : amok de poisson, bœuf Lok Lak, tom yum de poulet, dessert coco. L’amok est une mélange d’épice broyée au pilon avant d’être mélangée au lait de coco et aux fines tranches de poisson, puis placé dans un panier individuel en feuille de bananier avant une cuisson à la vapeur. Le lok lak tire son nom du jeu de dés, le bœuf étant découpé en petits morceaux cubiques avant d’être mélangé à une sauce tomate/ piment/ huîtres puis poêlé : le secret du plat réside dans le déglaçage du wok. Le tom yum est une soupe claire à la citronnelle, avec des légumes et des morceaux de poulet, toute simple mais délicieuse. Le dessert enfin est un flan à base de lait de coco et de zeste de citron, très sucré mais si bon ! C’est un véritable festin et nous peinons même à finir nos assiettes, ce qui est extrêmement rare !

En pleine préparation du mélange d’épices pour l’amok !

A table !

Pour notre dernière soirée, c’est soir de spectacle ! Nous allons assister à une représentation du cirque Phare Ponleu Selpak : créée par une française et 9 jeunes réfugiés dans les camps proches de frontière thaïlandaise, cette association vise à aider les enfants et jeunes défavorisés à exprimer leurs ressentis et traumatismes à travers l’art, leur offrant également une moyen de réinsertion et, pour les plus doués, une voie professionnelle. L’ONG propose ainsi des ateliers de dessin, peinture, sculpture, mais aussi arts vivants : danse et cirque. La représentation commence ainsi par quelques courtes scénettes de danse traditionnelle, puis un spectacle de cirque : celui que nous avons vu est articulé autour de 2 fantômes qui rendent visite à 4 villageois, ouvrant la porte à plusieurs tableaux de jonglage, acrobaties et pitreries. Les enfants de l’école peuvent assister gratuitement au spectacle et leurs rires francs sont communicatifs et animent le public !

Danse traditionnelle 

De souples fantômes au cirque Phare Ponleu Selpak

 

Nous quittons Battambang presque à regret, conquis par son ambiance et les sourires de ses habitants. C’est en bateau que nous rejoindrons Siem Reap en 8h de trajet : d’abord, sur la petite rivière à peine navigable en cette saison sèche, découvrant les habitations plus que rudimentaires sur les berges, puis lorsque la rivière s’élargit de véritables villages flottants apparaissent, avec des maisons plus grandes sur pilotis et des fermes à poissons. Enfin, le lac Tonle Sap s’ouvre devant nous, à perte de vue, si grand qu’on dirait une mer, et nous le traversons en diagonale pour arriver à notre prochaine étape, la plus célèbre du Cambodge…

Viens t’asseoir dans la cabane du pêcheur…

Dans un village flottant, on se déplace en barque

Plus de photos de Battambang, c’est par ici !

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Infos pratiques

Transport :

  • De Sihanoukville à Battambang, bus de nuit à 19h et 20h avec changement à Phnom Penh vers 2h du matin et arrivée vers 7h. Comme nous partions de Koh Rong Samloem, nous avons pris le ferry de 15h, pour un prix total de 19 USD.
  • De Battambang à Siem Reap, nous avons opté pour le bateau, départ 7h30 et durée 8h, 20 USD. Assez peu confortable et bruyant, mais il traverse de beaux paysages et villages flottants, c’est combiner transport et visite ! Attention, le quai d’arrivée est à 11 km de Siem Reap et les tuk-tuk sont à prix fixe 4 dollars par personne (pour 3 ou plus).

Hôtel : First Hotel, chambre double avec ventilateur (= sans climatisation) pour 6 USD, à environ 1 km au nord du centre-ville,  avec salle de bain rustique mais propre.

Visites :

  • Circuit architectural : en téléchargement libre sur le site de KA Architecture tours (ka-tours.org), deux circuits de 2 à 3 heures chacun à parcourir à son rythme.
  • Bamboo Train : situé environ 5 km au sud-est de la ville, coûte 5 USD par personne, l’aller-retour dure 1h.
  • Phnom Banan : temple préangkorien, 2 USD l’entrée.
  • Phnom Sampeau : temple, grotte naturelle, killing cave et chauve-souris. Ticket 1 USD.
  • Maisons traditionnelles du village Wat Kor : environ 2 km au sud du centre-ville, deux d’entre elles se visitent : Bun Roeung House et Khor Sang House, dans chacune un tour en français est proposé par les propriétaires. La première a le projet d’ouvrir quelques chambres en guesthouse dans ce beau cadre. Donation suggérée 1 USD.

Cours de cuisine : Coconut Lyly propose pour 10 USD un cours de cuisine avec 4 plats, et dégustation de nos réalisations. Incroyable rapport qualité-prix ! Voir www.coconutlyly.com.

Cirque : association Phare Ponleu Selpak, à 2 km au nord du centre, l’école peut se visiter pendant la journée, le spectacle de cirque a lieu 3 fois par semaine à 19h, coût 14 USD. Pour en savoir plus sur l’association : www.phareps.org.

2 réflexions au sujet de « Battambang – Le charme provincial »

  1. Merci pour cet article très intéressant, ça donne envie de prendre le temps de découvrir cette ville.

    Est ce que la recette de la soupe tom yum est la même que la recette thaï ?

    1. Hello Olivier !
      Battambang a en effet été une bonne surprise pour nous, beaucoup plus authentique que Siem Reap et plus agréable que Phnom Penh.
      Pour le tom yum, la version khmère est très proche (et probablement inspirée) de la recette thaï – même si nous avons ici remplacé les traditionnelles crevettes par du poulet. Délicieux en tous cas :p
      A bientôt !
      Jérémy et Daphné

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